Compte-rendu presse

Nouveau succès pour le rendez-vous annuel des acteurs de la filière des infrastructures numériques, qui a réuni près de 1500 participants à Bourges, au cœur d’un Berry déjà numérique, lors de l’Université du Très Haut Débit organisée par la fédération Infranum, idealCO et l’Avicca,

Si tous ont déjà la tête tournée vers l’ambition « France numérique 2030 », les pieds sont encore ancrés dans le plan France Très Haut Débit avec les enjeux de qualité de service, de complétude et de pérennité des réseaux. Dans ce contexte, la perspective de l’arrêt du cuivre fixe un jalon incontournable et impose de nouveaux défis, avant une bascule plus massive des territoires vers des modèles connectés et durables, pour plus d’usages au service des citoyens.

Généraliser la fibre à 2025

« Nous sommes tous focalisés sur l’objectif 100% fibre même si la limite est notre réponse aux raccordements complexes » plante Philippe Le Grand, Président d’InfraNum.

La mise en place d’une structure pour porter les investissements nécessaires au raccordement de ces 500.000 prises isolées ou complexes semble devoir passer par le dialogue et l’union de tous les acteurs concernés.

Dans les territoires, comme le Berry, pourtant exemplaire en matière de couverture fibre, des nuances sont apportées. « Alors que la zone d’initiative publique sera assurément couverte à 100% d’ici 2025, notre vigilance porte principalement sur la couverture des zones privées, plus denses » déclare Patrick Barnier, 1er Vice-président du Conseil départemental du Cher et Président de Berry Numérique.

  • La qualité

Une situation que les problèmes de qualité de raccordement viennent entacher. Ces derniers, bien connus de la profession, continuent de cristalliser l’attention et « d’exacerber les élus », selon Laure de la Raudière, Présidente de l’ARCEP.

Le plan qualité, présenté il y a un an, a commencé à être mis en œuvre de façon opérationnelle cet été. Il devrait produire ses effets à court terme et de nouveaux indicateurs renforceront le suivi.

Face à la perspective du projet de loi de Patrick Chaize, les opérateurs sont fortement mobilisés. « La qualité est un sujet prioritaire chez Orange et nous pensons qu’il ne faut pas changer les règles du jeu [référence au mode Stoc] en plein match. C’est un enjeu industriel » explique le nouveau CEO d’Orange France, Jean-François Fallacher, dans sa première allocution publique.

  • La fin du cuivre

L’arrêt du cuivre, qui sous-tend une complétude parfaite et une qualité irréprochable, s’impose donc comme un nouveau défi désormais planifié. « Il faut tenir l’objectif de l’extinction du cuivre en 2030 car ce sont tous les équilibres économiques qui seraient impactés par un décalage » prévient Antoine Darodes, Directeur du département investissements transition numérique à la Banque des territoires.

Cinq communes du Cher, choisies pour leur avancée en termes de couverture fibre, en font déjà l’expérience. « Nous avons appris il y a un an que le service serait techniquement coupé au 1er janvier 2025 et arrêté commercialement un an avant. Face à ce délai très court, nous avons déployé une batterie de moyens pour informer la population. Notre difficulté réside dans le fait d’emmener l’ensemble des habitants qui présentent des profils très variés et pour lesquels les plus fragiles sont souvent les moins appétants aux technologies » explique Marie-Pierre Cassard, Maire de Neuvy-en-Barangeon. Côté technique, les priorités concernent l’adressage (consistant à faire le lien entre les adresses cuivre et fibre) et la migration des lignes déjà actives.

  • Alerte sur l’emploi

Dans cette filière en constante évolution, l’enjeu de l’emploi revient comme un refrain qui a du mal à se faire entendre. La dernière étude Katalyse dans le cadre de l’EDEC, sortie en juillet dernier, évaluait les besoins à +30.000 emplois dans la filière d’ici 2030, soit une croissance de 5% par an. Si les passerelles internes entre métiers dans la filière (reconversion attendue de 13.000 raccordeurs fibre d’ici 7 ans, par exemple) semblent naturelles, le défaut d’attractivité de la filière inquiète. « Seulement 61% des places disponibles dans mon campus sont occupées. Pourtant, elles sont financées et à la sortie, une formation débouche systématiquement sur un emploi ! » déplore Pascal Goin, Président de la commission emploi-formation d’InfraNum et directeur du Campus numérique de Montereau. « Il nous faut une communication plus massive, à destination de tous les publics, y compris les femmes et les personnes en situation de handicap qui ont toute leur place dans notre filière » revendique Philippe Le Grand.

  • La transition environnementale

Dépassant sa mission première consistant à répondre au plan France Très Haut Débit, la filière est désormais établie dans une toute autre ambition, à l’image des thématiques abordées en ateliers : datacenter, sécurité, connectivité sans fil, usages et numérique responsable. Tous les acteurs partagent la conviction que la transition numérique peut être fortement contributive à la transition environnementale.

Temps fort de cette UTHD, Valérie Nouvel, Vice-présidente du Département de la Manche a remis son rapport « Territoires connectés » à Jean-Noël Barrot, Ministre délégué chargé du numérique. « L’enjeu est de passer de l’expérimentation à la mise en œuvre concrète des projets de smart territoires en contribuant à formuler la feuille de route gouvernementale » explique la rapporteure.  Articulé autour de 4 engagements, 9 recommandations et 38 propositions d’actions concrètes, ce rapport met notamment l’accent sur la mise en place de plateformes d’innovation au sein de chaque région, l’intégration du développement des usages numériques dans le STRADDET[1] en tant que politique d’aménagement du territoire, et le développement des jumeaux numériques (cf. https://presse.economie.gouv.fr/12102023-remise-du-rapport-territoires-connectes-et-durables-a-jean-noel-barrot-et-dominique-faure/).

Même si ce chantier soulève bien des enjeux, notamment en termes de maîtrise de la donnée, d’interopérabilité et de souveraineté, l’ensemble des acteurs de la filière est conscient et convaincu que l’avenir de tous est bien là…


[1]  Schéma Régional d’Aménagement et de Développement Durable du Territoire